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19 février 2014 3 19 /02 /février /2014 01:26

Saint Jean de Saint Denis

(1960)

D'un pas joyeux, nous marchons au long de la période de pénitence vers la Semaine Sainte et l'allégresse pascale.

Lorsque commence la Sexagésime, nous sommes déjà emplis d'un désir progressif de mourir et de ressusciter avec le Christ.

Combien cette période liturgique est admirable !

Et plus le temps de jeûne et de pénitence est profond, plus notre âme fleurit et devient printanière, car il y a une telle correspondance entre la vraie pénitence et le printemps que notre cœur de pierre s'amollit. Evitant la distraction des herbes mauvaises qui étouffent le bon grain, nous préparons, en nous concentrant, la bonne moisson.

En vérité, c'est une période de concentration de la prière, de jeûne, de demande de pardon, de révision de notre âme. Plus est ardente notre pénitence et plus elle prodigue à notre âme la floraison, la joie qui augmente en Dieu.

Une fois encore, je suis frappé par l'épître d'aujourd'hui de l'apôtre Paul. Le grand Paul est appelé dans l'Eglise «apôtre des nations» ; lui qui fut ravi au troisième ciel, qui entendit les paroles ineffables, doit se défendre devant les païens, devant les empereurs de Rome, devant la synagogue hostile au christianisme ; il doit aussi se défendre devant ses propres confrères, son propre peuple, comme si celui qui a été engendré en Christ devait se défendre devant eux !

Il est rare dans l'humanité que la mère soit méprisée par ses enfants ou, comme Paul, rejetée par sa postérité spirituelle, le contraignant à dire : moi aussi, je suis juif, moi aussi j’ai travaillé plus que les autres ; vous supportez vos détracteurs qui vous crachent au visage, vous humilient, vous dépouillent, mais en raison de ma faiblesse et parce que je vous aime, vous mettez en doute mon apostolat !

Ce saint Paul, cet humble Paul, doit souligner à cette foule qu'il a convertie, baptisée en Christ, portée dans ses entrailles spirituelles, qu'il a travaillé pour elle et il doit le lui répéter.

Pensant alors à Paul, j'ai immédiatement saisi que tous les Paul qui accomplirent de grandes choses dans l'histoire de l'Eglise, ne furent pas que persécutés du dehors comme les martyrs, mais incompris et meurtris par leurs propres frères : les Hilaire de Poitiers, Athanase d’Alexandrie, Photius le Grand et tant d'autres, jusqu'à la petite Thérèse de Lisieux de qui certaines de ses sœurs disaient, lorsqu'elle mourut : «Cette petite, vraiment, lorsqu'elle sera morte, on n'aura rien à dire sur elle».

Pourquoi, pourquoi l'œuvre du Christ, cette Epouse immaculée pour laquelle Il versa son Sang précieux, pourquoi l'Eglise n'accorde-t-elle pas un soutien total à ses enfants, n'agit-elle pas à la manière de l'Etat qui donne sa protection à des savants en aidant la recherche scientifique, qui paie les généraux, les soldats, les députés, les hommes utiles à la cité du haut jusqu'en bas de l'échelle sociale ? Pourquoi les généraux du Saint-Esprit, les élus du Père ne reçoivent-ils pas de salaire, mais sont au contraire persécutés, incompris ? Pourquoi Dieu a-t-il organisé cette Eglise étrange ? Pourquoi celui qui vit au sein du Christ est-il, depuis les temps apostoliques, obligé de crier sa confession ?

Traverser des épreuves, c'est de l’eau qui coule en dehors de sa maison ; mais être attaqué par les siens...!

Le Christ l'a prévu et ne l'a point caché. Il a dit : «La vie de l'Eglise sera fondée sur la pierre de la foi et les portes de l'Enfer ne pourront l'ébranler» (Mt 16, 18). Mais Il a aussi averti que la sœur serait contre sa sœur, le frère contre son frère, le père contre son fils (Lc 12, 53). Il a envisagé une multitude de Paul dans l'Eglise, donnant toute leur vie pour souffrir des gens du dehors, et aussi de l'intérieur de leur famille, sinon même de leurs enfants.

Je connais une gravure de l'époque romantique, d'origine anglaise ou allemande, je ne sais plus, représentant le diable qui laboure la terre avec un air fort satisfait, et cette gravure porte cette inscription : «Ainsi je fais souffrir les âmes». Oui, mais, derrière le diable, passe le Christ qui jette la semence.

Les épreuves sont le fait du diable, oui, mais celles des saints, depuis saint Paul jusqu'à la petite Thérèse, sont plus profondes parce que la terre dans l'Eglise est vigoureusement remuée ; sans elles, il n'y a qu'un petit jardinage pour salades et non pour du blé. Le diable se sert de toute sa sagesse ; il envoie une théorie d'obstacles : il n'est pas facile parfois, étant trahis par ses frères, de demeurer amoureux de Dieu et de l'Eglise et Satan travaille subtilement afin qu'on abandonne. Et qu'arrive-t-il ? Il fait naître une bonne terre grasse, noire, et la semence divine tombe sur les saints de telle manière que le meilleur blé sort de cette terre grasse.

Le Christ aime tellement ses Paul, jusqu'à la petite Thérèse, qu'Il veut qu'aucun grain de sa Parole ne se perde en leurs âmes.

S'ils étaient bien portants, soutenus et loués par les leurs, récompensés comme l'Etat récompense les généraux et les hommes célèbres ou les vedettes de cinéma, imperceptiblement, leurs cœurs seraient moins labourés et s'empliraient de petites pierres de vanité, d'indifférence, de plaisirs, de distractions ; si le grain n’était pas tombé en profondeur, les oiseaux le picoreraient et le mangeraient peu à peu. En l'Eglise nul grain ne se perd. Tous donnent des fruits.

Et l'apôtre Paul pense : Je veux me glorifier de ma faiblesse, car dans ma faiblesse est la force de Dieu (2 Co 12, 9-10). Je veux chanter Dieu pour toutes les faiblesses, pour toutes les épreuves, l'incompréhension de mes confrères, de mes enfants engendrés dans mon apostolat, car chaque épreuve qui est une douleur d'aujourd'hui prépare le terrain où la grâce et la gloire et la puissance de Dieu agiront soudainement !

En effet, disons-le, si nous ressentons aujourd'hui, au travers des paroles de l'Apôtre, la tragédie, le cri de douleur, l'indignation, la souffrance, mes amis, si nous pouvions nous indigner et dire orgueilleusement : j'ai travaillé plus que les autres, et, simultanément, je ne veux pas me vanter, si nous savions mesurer cette profondeur de peines à travers les siècles, nous comprendrions que nos petites douleurs ne sont rien, mais «vous n'avez pas de mesure pour les mesurer...».

Pourtant, ne craignez pas les souffrances... car l'apôtre Paul fut aussi ravi au troisième ciel !

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Published by Monastère Orthodoxe de l'Annonciation - dans Homélies

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